Peu de routes sont aussi évocatrices que la Carretera Austral. Mythique terre d’aventure et d’isolation, son simple nom ravivera les rêves enfouis ou les souvenirs impérissables.
Construite à la demande de Pinochet pour désenclaver la région d’Aysen afin de cesser les échanges avec l’Argentine et ainsi renforcer la souveraineté chilienne, son chantier fut titanesque et pris plus de 20 ans. Pour le pays, il fut également l’ouvrage le plus coûteux du siècle.
Longue de 1240km, elle relie la ville de Puerto Montt à celle de Villa O’Higgins, certains passages s’effectuant en bac ou en ferry.
Si la route n’est plus aussi hostile et isolée qu’elle le fut par le passé (une bonne partie est désormais asphaltée, les hébergements sont nombreux, et les touristes omniprésents), elle demeure une région sauvage et imprévisible, abritant de nombreux (et immenses !) parcs et réserves nationaux.
Glaciers, fjords, volcans mais aussi pumas, guanacos, dauphins… Nous l’attendions avec impatience cette fameuse Ruta 7 ! Nous vous contons nos 18 jours de pérégrination dans cette formidable région.
- Parque Alerce andino
- Puerto Montt
- Parque Hornopiren et laguna Cabrera
- Parque Pumalin Douglas Tompkins
- Parque Corcovado
- Puyuhuapi
- Parque Queulat
- Villa Santa Lucia
- Puerto Cisnes
- Cohaique
- Parque Cerro Castillo
- Puerto Rio Tranquilo et les grottes de marbre
- Rio Baker
- Parque Patagonia
- Cochrane
- Glacier Calluqueo
- Caleta Tortel
- Ferry Puerto Yungay – Puerto Natales
- Ce qu’on a aimé
- Ce qu’on a moins aimé
- Notre conclusion
Parque Alerce andino
De retour de Chiloé, nous attaquons cette route par le premier parc national, proche de Puerto Montt : Alerce Andino. Il prend son nom de l’arbre ancestral qu’il abrite, le cyprès de Patagonie ou fitzroya. Endémique de la région, il peut atteindre plus de 3000 ans, ce qui en fait la deuxième espèce avec la plus grande longévité au monde !
Arrivés en court de journée (13h), on nous informe que seuls 2 sentiers sont ouverts dans le parc ! Malgré sa modeste altitude, celui de la laguna Fria que nous avions envisagé initialement serait encore sous la neige ? Nous interrogeons quand même les gardes de la CONAF à ce sujet, et non le sentier est bien accessible mais ils ne tolèrent pas d’entrée après 11h. On commence à être rodé après 1 mois ici, mais toujours bien sonder les agents pour être sûr des termes qu’ils emploient, « fermé » ne veut pas toujours dire fermé !
Première fois que les billets peuvent être pris directement à l’entrée. Même en les ayant achetés en ligne, il faut faire la queue pour se recenser à l’entrée et de nouveau compléter le formulaire, ça valait le coup de les prendre en avance… Le parc est en effet très prisé des familles chiliennes, attention aux week-ends en été !
Nous marchons jusqu’à la laguna Sargazo, le sentier principal du parc. C’est balisé et bien aménagé par des passerelles, 2,5km pour peu de dénivelé. Une grande lagune se dévoile alors, bordée par les montagnes recouvertes de bois d’alerces. La vue est belle, les chiliens se prennent en photos et déjeunent au bord de l’eau. On rebrousse chemin, et on bifurque au départ du sentier vers le mirador de la lagune, pas forcément bien indiqué. Ça grimpe déjà un peu plus, et le sol est particulièrement boueux. En chemin, on croise un arbre immense, sans doute l’un des plus anciens du parc. Ludique, le chemin est parsemé d’infos sur la faune et la flore du parc. En haut, le mirador offre une belle vue aérienne du lac.
Une réserve équivalente existe côté argentin pour les alerces. Il existe également un parc chilien consacré à une autre espèce qui pousse sur la côte, et auquel appartient le plus ancien spécimen observé.
Si le parc est sympathique, on considère que le prix est élevé pour ce qu’il offre à voir et faire. Cela dit, il offre de sympathiques balades familiales.
Sur le retour, à mi-chemin entre les 2 secteurs du parc, un chemin sur la droite permet d’accéder à un petit mirador caché de la route où nous passerons une agréable soirée.
Prix d’entrée du parc : 8,5€ par adulte
Puerto Montt
Pour des raisons de météo, on a fait l’aller-retour au parc Alerce Andino depuis Puerto Montt, avant de remonter à Osorno pour se rendre au parc Vicente Perez Rosales.
Puerto Montt marque le début officiel de la Carretera Austral, la fameuse ruta 7 dont on trouve le panneau du km 0 en centre-ville le long de la côte. C’est une grande ville, on en profitera donc pour faire le plein de provisions pour les prochaines semaines. On y trouve de nombreux supermarchés (évidemment avec parking payant) ou un grand mall avec un magasin Decathlon. Pour nous, dernières emplettes pour le matos, et quelques tubes de silicone pour l’étanchéité du coffre.
On conseillera de faire un tour au marché, que ce soit celui du port où les pêcheurs jettent les restes aux lions de mer pour le grand plaisir des touristes, ou le marché central pour y découvrir les plats locaux. On y dégustera un dernier pastel de choclo, ô réconfortant en cette journée de pluies diluviennes, la première d’une triste lignée.
Parque Hornopiren et laguna Cabrera
Après un détour par le parc Vincente Perez Rosales, on reprend le chemin de la Carretera. Pour cela, on choisit de contourner la baie … qui évite de repasser près du parc Alerce Andino ou de prendre le ferry ; qui plus est, la section est censée offrir de superbes paysages.
Dans les faits, il pleut, le brouillard est dense et la route, en cours de pavement, paraît interminable. Le chauffage du van ne fonctionne pas, nous parvenons enfin à Hornopiren une fois la nuit tombée, fatigués et transis de froid. On se replie vers le premier et seul restaurant ouvert (Entre montanas) pour se réchauffer. L’ambiance de chalet et le feu de cheminée sont un réconfort certain. Nous commanderons 2 pintes et une pichanga, plat de frites avec des morceaux de viande, légumes et pickles, pour environ 32€.
La pluie tombe toujours sans discontinuer. Une fois sorti, on recherche rapidement un spot le long du port, mais rien ne nous convient ; nous nous garons finalement dans une rue tranquille où nous ne serons pas dérangés.
Le lendemain, il pleut toujours, évidemment. Notre ferry du jour pour continuer la Carretera est annulé en raison des conditions climatiques. On se rend dès l’ouverture au bureau de la compagnie maritime, déjà bondé. Les conditions semblent meilleures pour les jours à venir, notre trajet n’est retardé que d’un jour, nous voilà rassurés. Maintenant, direction le parc national d’Hornopiren.
On se motive malgré la pluie ; un bon café, on s’inscrit au registre du parc et on se lance sur le sentier. 50m, c’est probablement la distance la plus courte qu’on ait jamais parcourue avant de se demander si l’on ne ferait pas demi-tour. Le sentier s’est mué en rivière d’une bonne dizaine de centimètres. Sans doute davantage par fierté de ne pas repasser devant le garde CONAF après si peu, on s’agrippe aux barbelés qui bordent le chemin, et on essaie d’avancer tant bien que mal. Mais la rivière devient torrent, et la boue plus profonde. A quoi bon ? On renonce et on rentre à la voiture, bredouilles.
Le parc, et cette randonnée Pinto Concha, ont la réputation d’être très boueux toute l’année, et il faut rester vigilant notamment à la redescente. Hors de la rare période en milieu d’été, avec une bonne météo les derniers jours voire semaines, on déconseille de tenter le coup. Et sinon, pour les plus valeureux : bottes, bâtons et de la patience seront vos meilleures armes.
On se pose à l’est du village, après le rio Negro, plein d’espace disponible et aucun passage, nous y passerons un après-midi bien terne à attendre le soleil. Au réveil le lendemain, il est enfin de retour, on découvre d’ailleurs en fond le volcan Hornopiren, couvert d’un manteau blanc !
Vite on enfile nos chaussures et on se dirige vers la laguna Cabrera. La rando fait 7km et 400mD+. On débute par un chemin de 4×4, au milieu d’une végétation très dense. Ça grimpe peu à peu, puis le chemin devient inondé. Heureusement, cette fois des pontons en bois permettent de continuer. Cela dit ils ne datent pas d’hier, certains passages sont délicats et nécessitent quelques acrobaties. Hop première chute pour Camille et les pieds dans l’eau !
A une intersection, un panneau indique l’ascension au volcan Hornopiren. Encore trop tôt dans la saison, dommage ça nous aurait bien tenté. Là-haut on découvre une grande et belle lagune entourée des montagnes encore enneigées. Personne autour, on prend le temps d’apprécier. Peu avant, une petite chapelle existe à la mémoire de familles disparues sous l’éboulement d’un pan de montagne en 1965.
Le ferry d’Hornopiren
Hornopiren est un passage obligé pour continuer sur la Carretera Austral. Si une autre route descend plus au sud, aucune ne permet néanmoins de rallier la suite de la Carretera, il faut nécessairement prendre un ferry. La traversée dure 3h30 au milieu des fjords et montagnes. S’ensuivent 10km à la queuleuleu pour reprendre un second ferry pour 45min. Destination finale Caleta Gonzalo, l’entrée du parc de Pumalin.
Prix : 80€ la traversée (70 pour la voiture + passager, 11 par passager supplémentaire)
Parque Pumalin Douglas Tompkins
L’histoire du parc Pumalin est intrinsèquement lié à celle du couple de milliardaires américains Douglas et Kristin Tompkins (fondateurs de la marque The North Face), qui à l’époque achetèrent de nombreux territoires en Patagonie pour les préserver et fonder des réserves de biodiversité. A la mort du premier, en 2015, des parcelles furent léguées au Chili pour devenir un parc national, géré par la CONAF.
Si le parc est immense, seuls quelques secteurs peuvent être visités et ce, gratuitement (du moins c’est encore le cas en 2024). Plusieurs sentiers sont accessibles :
- Los Alerces : petite balade au milieu des arbres éponymes. Rapide et sympathique, à ne pas manquer. Après le ferry, on a d’ailleurs dormi sur le parking face au sentier ; plus aucune voiture après les derniers passagers.
- Cascadas escondidas : sentier de 4km aller-retour, au départ d’un camping, dans une forêt humide conduisant à 2 belles cascades. Très chouette également, mais ça grimpe, et ça glisse !
- Lago negro : encore au départ d’un camping, petit parcours au travers de passerelles en bois pour observer le lac. Rien de mirobolant, mais c’est rapide.
- Reineta de Darwin : Le sentier est nommé d’après une minuscule grenouille endémique de la région. Elle est plutôt rare, soyez attentifs, nous on n’a rien vu. Le sentier de 4km est relativement plat à travers la forêt puis longe la rivière. C’est une sympathique balade pour observer les espèces forestières qui ne nous a pas paru primordiale.
Tips : à l’entrée du parc, vous pouvez faire tamponner votre passeport. - Volcan Chaiten : près de la ville du même nom, il est malheureusement connu pour avoir causé la plus grave éruption volcanique du Chili. En 2008, il détruisit tout un pan de la ville, où figure encore les stigmates de la catastrophe…
Son ascension est assez aisée, bien que pentue, suivant un sentier de 2km avec 700m D+, essentiellement en escaliers. On observe les dégâts causés par l’éruption sur les environs : les arbres morts et les coulées de lave encore visibles offrent une vision parfois apocalyptique.
Là-haut à 1122m d’altitude, la vue à 360° sur les environs et surtout la caldeira est impressionnante. Le paysage, tour à tour lunaire ou désertique, offre un formidable panel de couleurs. Des fumerolles s’échappent du volcan. On recommande chaudement.
Un autre sentier existe, depuis Caleta Gonzalo. Assez long, nous n’avons guère trouvé d’informations à son sujet. Enfin, après le sentier de la reineta, un trek sur 2 jours (voire une grosse journée ?) permet de rejoindre le glacier au pied du magnifique volcan Michinmahuida. Nous avons fait l’impasse par manque de temps ; après tout des glaciers nous en verront bien d’autres par la suite.
Les campings, situés au départ des randos, sont plutôt bien équipés (mais demeuraient encore fermés à cette époque de l’année (novembre).
Au milieu du parc, on traverse le village de Chaiten, où l’on y trouvera quelques tiendas, une bonne boulangerie et l’essence le plus cher de la Carretera, évidemment le moment où on a choisi de remplir le bidon de secours. Derrière le village après le pont, en passant par un ancien camp de l’armée abandonné, on découvrira une magnifique cascade dans un petit canyon, moyennant un bon passage à gué glacial. C’est facile à trouver, les 2 chiens sur place joueront les guides pour vous !
Parque Corcovado
A 58km au sud de Chaiten se situe le départ du seul sentier habilité du parc national du Corcovado. Il ne faut pas le rater, aucun panneau ne l’indiquant sur la route. Si vous ne pourrez observer le sommet du magnifique volcan qui a donné son nom au parc, le sentier de 3km, relativement plat mais semé d’embûches (peu d’entretien : troncs en travers, beaucoup de boue…) offre une belle balade jusqu’au mirador sur le glacier Yelcho. Aucune cabane de la Conaf au départ, seulement quelques panneaux, l’entrée est gratuite. Une chouette balade sur la route, et notre premier glacier du voyage !
Puyuhuapi
Tranquille village portuaire au bout d’un fjord, vous y trouverez surtout des touristes venus visiter le parc national de Queulat, tout proche, et quelques supérettes pour les produits basiques. Nous passerons la nuit au bord de l’eau, en suivant un chemin au nord du village. Au loin on observera des otaries jouant dans l’eau et des dauphins de passage près de la côte.
Parque Queulat
Incontournable de la Carretera, le parc national de Queulat accueille chaque jour des centaines (milliers ?) de touristes venus admirer son glacier bleu, perché au-dessus du lac, et qui laisse échapper de petites chutes d’eau. C’est l’un des glaciers les plus aisément accessibles en Patagonie.
A Puyuhapi, il a plus sans discontinuer. L’eau s’est infiltrée à l’intérieur du van, le matelas est bien humide sur les côtés et au niveau du coffre. John se rend compte que l’eau a également coulé dans ses chaussures, trempées. Le réveil est clairement compliqué. Il pleut trop pour envisager un café, on décide de se diriger directement vers le parc. Une fois arrivés, le ranger nous informe que le glacier est resté dans la brume toute la veille, mais un créneau semble possible en fin de matinée. Les tickets, avec le nouveau système de réservation, ne peuvent plus être pris directement sur place, et il n’y a bien sûr pas de réseau dans la zone. On repasse donc par le village de Puyuhapi pour patienter, acheter les tickets, et nous voilà de retour. En effet, quelques lueurs de soleil émanent entre les gouttes, c’est le moment !
Plusieurs sentiers existent, certains ludiques pour la compréhension des glaciers et explorer les traces géologiques qu’ils ont laissées, mais la majorité permet d’offrir différents points de vue sur le glacier. Un premier mirador offre une vue latérale depuis le bas. On y accède assez rapidement, compter un quart d’heure.
Après avoir traversé une passerelle, 2 nouveaux sentiers apparaissent ; à droite on peut accéder à la rive du lac et observer le glacier par dessus . C’est le point de départ des bateaux pour ceux qui souhaitent se rapprocher (15€), mais on doute de l’intérêt. Enfin le sentier qui part à gauche de la passerelle mène au mirador principal, qui vous offrira le plus beau point de vue, après 3km pour 300m D+. Le chemin est fort boueux en cette période, on esquive comme on peut les nombreuses flaques. Déjà beaucoup de passage, même en cette période de pré-saison. On mettra 1h environ pour atteindre le point de vue ; par chance le glacier est dégagé, il faut reconnaître qu’il est magnifique.
Avec le recul, et les nombreux glaciers qu’on verra par la suite, il ne restera néanmoins pas dans nos mémoires : peu imposant, bondé de monde… Peut-être ferions-nous l’impasse si c’était à refaire.
Prix : 11,4€ par adulte
Villa Santa Lucia
Sur le chemin, on s’arrête dans le village de Villa Santa Lucia. En 2017, à la suite d’intenses précipitations, un morceau de glacier a cédé, emportant la majeure partie du village. Une espace de mémoire a été érigé par les locaux près d’une des rares maisons qui a survécu à la catastrophe. Il relate les évènements survenus, présente des photos de la vallée avant, et rend hommage aux personnes disparues. Après Chaiten ou la laguna Cabrera, c’est un autre témoignage vibrant du caractère imprévisible de la Patagonie.
Puerto Cisnes
Détour de 35km pour le village de Puerto Cisnes où nous comptons passer la nuit, et dont on a pu avoir de bons échos sur d’autres blogs. C’est un petit village ; on se promène sur la jetée, on écume les quelques supermarchés à la recherche de pain de mie qu’on ne trouvera jamais, et on jette notre dévolu sur une minuscule boulangerie. Le vendeur, tout un personnage, souhaite converser avec nous plutôt que de simplement nous vendre du pain sans qu’il n’y ait aucun échange mutuel. S’ensuit une charmante conversation, à l’issue de laquelle nous lui achetons du pan amasado et qu’il nous offre un galet qu’il a peint à l’effigie de Puerto Cisnes avec la phrase « la belleza esta en lo sencillo » (la beauté est dans la simplicité), en échange nous lui promettons d’envoyer un jour un objet de France ou d’ailleurs, pour que se perpétue cet échange.
Trêve de bavardages, il pleut (tout le temps là-bas, nous dit-il) et il fait froid, nous partons à la recherche d’un bivouac pour le soir. Au sud du village, en bord de côté, le camping municipal est gratuit et dispose d’abris pour cuisiner, parfait ! Au matin, Camille discute avec la personne en charge du camping. Il y aurait des toilettes mais surtout une douche chaude ! Elle revient avec un grand sourire et c’est finalement parti pour une douche à 8h du matin… gelée. Il va falloir travailler son espagnol, il en relève de notre survie !
Cohaique
Passage obligatoire par Cohaique, c’est la 2ème plus grande ville de la Carretera après Puerto Montt. On y trouvera tout ce dont on a besoin pour la suite ou en cas de pépin mécanique. Pour notre part, c’est l’occasion de faire le plein de courses dans un grand supermarché et d’essence. On en profite pour déjeuner au bord de la ville, où un espace est aménagé avec une vue sur la vallée.
Parque Cerro Castillo
S’il s’agit d’un parc national, la majeure partie des terrains, ou en tout cas les accès, semble privée et ce n’est donc pas la CONAF qui gère et récolte l’argent. Pour le coup, c’est le parc le plus onéreux qu’on ait eu à payer pour l’instant (hormis l’île de Pâques).
Décrit par certains comme le nouveau Torres del Paine, il propose un trek de 4 jours d’un point A à un point B, illustré le plus souvent par la vue de la laguna Castillo, surmontée d’une formation rocheuse à la forme de château qui a donné le nom au parc. Malheureusement en cette saison, et souvent jusqu’à fin décembre, l’accès est interdit. On décide tout de même d’entrer dans le parc pour rejoindre la laguna Duff, seul sentier ouvert. Sur la route on se gare au panneau qui défend au 2wd de s’aventurer plus loin. En réalité, à l’exception d’une bonne côte peu après le panneau, le chemin est plat et en parfait état. On marche donc les 3km pour rejoindre le départ. Pas de remise sur la saison, le prix est de 18€ pour accéder au parc. La montée est plutôt régulière pendant les premiers kilomètres à travers les bois. Le temps n’est guère au rendez-vous mais on profite de belles vues sur la vallée et on aperçoit les sommets du parc. On franchit le premier camping près de la rivière, au milieu des bois. Il dispose de toilettes sèches et de tables de pique-nique. Là-haut, le chemin devient plutôt roulant, mais le sol est recouvert de neige et freine la progression. On atteint le second campement puis on sort de la forêt. Le décor est somptueux, nous marchons le long de la rivière, au milieu des montagnes. On aperçoit le fameux cerro Castillo entre les nuages. Il neige cependant, et le vent est glacial ; au sol, la neige molle se mêle à l’eau des ruisseaux, on s’enfonce de plus en plus, on se croirait dans une tourbière. La laguna est encore loin, nous nous arrêtons là, au beau milieu de ce cirque blanc et sauvage.
Évidemment, on aurait préféré réaliser le trek complet mais nous avons apprécié le moment, qui nous a rappelé nos errements hivernaux dans les Alpes grenobloises.
Les campements sont gratuits au sein du parc, vous ne payez qu’en fonction du nombre de jours que vous comptez rester.
Prix du parc : 18€ pour 1 jour, 24 pour 2 jours, 28 au-delà
Puerto Rio Tranquilo et les grottes de marbre
Le village de Puerto Rio Tranquillo est un autre incontournable de la Carretera. On y passe pour visiter les grottes de marbre du lac General Carrera, comme pour se rendre dans la vallée Exploradores, pour marcher sur le glacier ou visiter la laguna San Rafael.
Après avoir dormi sur le côté de la route, au bout du village, nous nous dirigeons vers les cabanes qui organisent les tours sur le lac. Ceux en bateau sont curieusement moins onéreux que de louer un kayak et permettent de couvrir plus de zones, d’autant que le lac est déchaîné. 2 tours sont proposés, un court pour se concentrer sur le sanctuaire et un plus long qui va également explorer la rive opposée du lac où d’autres grottes, moins pures, existent. Nous optons pour le second de 2h30.
Les grottes du côté est sont déjà très belles, elles offrent différents panels de couleurs et textures. On nous conte aussi l’histoire de la région où des mines étaient exploitées.
On explore plusieurs grottes puis on repart pour la côté ouest. Là-bas, le sanctuaire comme ils le nomment est composé de plusieurs rochers distincts : la « cathédrale », « chapelle » et les fameuses grottes de marbre. Les couleurs sont formidables, et le bleu du lac se reflète dans le marbre. C’est unique !
Les traversées du lac secouent particulièrement. Les derniers remous sont de trop, à peine descendue du bateau Camille laisse échapper les 2 derniers repas et est à 2 doigts du malaise.
On regrette de ne pas avoir opté pour la laguna San Rafael dont on a ensuite eu de très bons échos d’autres voyageurs. Le trajet dure plusieurs heures (en bus et bateau) et offrirait des paysages formidables.
La route qui longe ensuite le lac General Carrera est magnifique et offre de nombreux points de vue. Mais Camille, au bord du malaise, n’en profitera pas, guère plus que John, peu habitué à conduire, qui doit faire face à un chemin de terre jonché de trous.
Prix : 20€ circuit court, 30€ pour le complet
Rio Baker
A Puerto Bertrand, nous faisons halte sur la place du village, le temps que Camille reprenne ses esprits. Outre un wifi gratuit qui occupera John pendant quelques heures, Puerto Bertrand est connu pour être le point de départ du rio Baker, lui aussi un point incontournable de la Carretera qui nous accompagnera pour les prochains 200km jusqu’à Caleta Tortel. Il fut un élément central de la colonisation de la région.
Ce qui marque, c’est bien sûr sa couleur d’un bleu profond, comme on n’en avait peut-être jamais observée auparavant. Lorsqu’il rencontre le rio Neff chargé en sédiments, quelques kilomètres plus loin au lieu nommé la Confluencia, et qu’en ressortent des eaux laiteuses turquoise, la vue de ce camaïeu de bleu est exceptionnelle. Le sentier, gratuit et indiqué depuis la route, se suit en seulement quelques minutes, ne le manquez sous aucun prétexte ! Peu après, plusieurs spots de bivouac exceptionnels sont possibles, mais mieux vaut arriver tôt. Nous dormirons un peu plus loin avec vue sur le canyon.
Plus tard, une autre Confluence avec le rio Chacabuco est indiquée depuis la route. Jusqu’à l’embouchure, on suivra le rio Baker et on prendra le temps de noter et apprécier toutes les nuances qu’il nous offrira au fur et à mesure que les glaciers se déversent dans celui-ci.
Parque Patagonia
Voilà un endroit dont nous aurons longuement profité ! Déjà, nous avons un peu plus de visu sur ce qu’il nous reste avant le ferry : peu de route, potentiellement rien d’autre à voir sinon quelques villages, on peut se consacrer pleinement à Patagonia. Rappelez-vous le parc Pumalin, ici encore ce sont les époux Tompkins qui en sont à l’origine. Tombés sous le charme de la région, surexploitée depuis de nombreuses années pour l’élevage bovin, au point qu’une bonne partie de la flore avait disparu, ils rachetèrent plusieurs milliers d’hectares pour la création d’une réserve. Après avoir fait don des terres au Chili, un parc national a récemment été créé et est désormais dirigé par la CONAF. 3 secteurs existent à la frontière avec l’Argentine.
- Jeinimeni au nord-est, accessible depuis Chilechico à la frontière
- Chacabuco, connu parfois comme Patagonia, depuis la route 7 après la confluence
- Tamango au sud, aux portes de Cochrane
Nous faisons l’impasse sur le premier, qui nécessiterait un détour bien trop conséquent, et entrons au secteur principal Chacabuco. La route mène ensuite au paso Roballos vers l’Argentine, qui nécessite de réaliser en amont toute une paperasse.
Sur la route, la vallée se découvre peu à peu, immense et désertique, parcourue par quelques ruisseaux. Les guanacos, cousins sauvages du lama, sont nombreux à parcourir les steppes, nous n’en avions jamais vus autant en un seul endroit !
On parvient à l’accueil au sein du parc, où on trouve également lodge, restaurant et cafétéria. Les bâtiments sont magnifiques, tels de beaux manoirs, en vieilles pierres et bois, très luxueux, un peu vintage, la pelouse finement coupée. Une véritable oasis au milieu des steppes arides où se repaissent des guanacos à quelques mètres de nous.
On paie l’entrée et la première nuit. Si on peut rester la durée que l’on souhaite au sein du parc (peu importe le secteur), il est interdit de bivouaquer en dehors des campings payants. Dans les faits, personne au sein du parc ne nous demandera notre entrée, et il n’est pas impossible qu’on ait malencontreusement omis de régler quelques nuits…
L’entrée permet d’accéder au musée qui met en lumière les dégâts causés par l’homme et le but des parcs nationaux et notamment du Patagonia. C’est un brin moralisateur mais plutôt éducatif.
Prix : 11,5€ l’entrée par adulte et 8€/p la nuit au camping
Lagunas altas et camping West Winds
On se met de suite en route pour la longue randonnée des lagunas altas (19,5km + 2km, 1000D+), une boucle au départ du camping « West Winds » qui croise de nombreuses lagunes et offre un beau panorama sur la vallée. Le retour est un peu longuet, on se pose au camping, grand et très joli, où les guanacos broutent parfois sur la pelouse. Il se dit que des pumas passent régulièrement aux abords !
On profite de la douche (solaire) plutôt chaude et des abris à disposition pour cuisiner. Quitte à profiter de cette nuit 4 étoiles, on fait aussi notre lessive à la main et on utilise les barrières du parking comme étendage.
La Vega, mirador Tompkins et camping Casa de Piedra
Petit-déjeuner tranquille à regarder les guanacos brouter la pelouse des West Winds, on élabore un plan pour les prochains jours. On décide d’emprunter l’itinéraire « La Vega » pour se rendre à l’accueil et nous renseigner sur les sentiers ouverts. Il s’agit d’une boucle de quelques kilomètres ; si la première moitié suit simplement la piste qui se rend au camping, l’autre est plus agréable et serpente dans la pampa, entre bois et ruisseaux. A la fin il rejoint le lodge en passant par un petit cimetière où est notamment enterré le fondateur du parc.
Direction ensuite le mirador Tompkins situé au bout du parc, en direction du paso. On croise de belles lagunes tandis que le chemin se détériore et laisse la place à de la tôle ondulée. On aperçoit un superbe lieu de pique-nique, où il se dit que les époux Tompkins s’entichèrent du lieu et comprirent l’importance de la préserver. Parvenus au dernier camping « Alto Valle », peut-être le plus beau mais malheureusement clos en cette saison, nous réalisons l’aller-retour (12km) pour le mirador Tompkins qui offre une vue somptueuse sur le lac Cochrane et la longue chaîne de montagnes qui lui succède.
Le retour est long et pluvieux, sur une route parfois chaotique. On s’arrête pour vérifier que rien n’a cassé, tant les bruits sous la capot nous inquiètent. A priori, rien de particulier, mais on passera la nuit au deuxième camping, la « Casa de Piedra ». Il porte assez bien son nom, avec un grand bâtiment de pierre au milieu d’une prairie, où l’on profitera d’une douche tiédasse et surtout d’un dîner à l’abri et en lumière.
On retourne ensuite au parking où doivent stationner les vans pour la nuit.
Avillès loop
Au matin, la météo est grisâtre, mais on se motive pour la boucle Avillès, au départ du camping. On suit le canyon d’un côté avant de le franchir via une imposante passerelle et de revenir par l’autre côté. On traverse une rivière à gué, l’eau est glaciale, et on enchaîne un épisode pluvieux et un autre de grêle. Cela dit, la vallée est formidable, les sommets se sont parés d’un léger voile blanc avec les dernières précipitations qui contraste avec une végétation dorée. C’est le chemin qui rejoint le secteur Jeinimeni.
On retourne ensuite au premier camping « West Winds » où l’on jouit d’un après-midi paisible au soleil. On fera alors la connaissance d’un couple français avec qui nous partagerons le ferry quelques jours plus tard.
Grande traversée Tamango – Chacabuco – Jeinimeni
Une grande randonnée permet de traverser tous les secteurs du parc, mais nous ne disposons pas du temps nécessaire. Au départ, nous avions considéré de n’en réaliser qu’une partie : Chacabuco à Jeinimeni sur 60km. Après renseignement auprès de l’accueil du parc, le sentier est bien ouvert, ils préconisent 4 jours (mais 2 nous paraissent suffisants au vu du topo) et il faut simplement signer un papier selon lequel on s’engage à respecter les règles élémentaires telles que de ne pas faire de feu ou abandonner ses déchets. Cependant, une fois parvenus à Jeinimeni, 2 choix s’offriraient à nous, faire le chemin inverse soit 2 jours supplémentaires, où rallier Chilechico en faisant du stop (car 54km les séparent). Nous sommes dubitatifs sur les chances de trouver un stop dans ce secteur assez peu visité, de plus il faudrait en refaire une fois à Chilechico d’où les bus ne partent que 2 fois par semaine, et enfin espérer qu’un bienfaiteur nous ramène ensuite jusqu’au véhicule dans le parc. Si on aime bien l’idée de pimenter un peu le séjour, nous ne pouvons pas risquer de rater le ferry dans quelques jours… Nous troquons le projet au profit d’une version simplifiée, le trajet Chacabuco – Tamango : 39km / 1400D+.
Départ du camping « West Winds », par la même trace que les lagunas altas, puis nous bifurquons à la première lagune pour le col qui donne sur le secteur de Tamango. Là-haut, le vent est glacial, on ne traîne pas. Bien plus de neige de l’autre côté, cela freine la progression. Soudain, le chemin disparaît sous une forêt décimée par les vents ; il faut enjamber les troncs en essayant de retrouver la suite du chemin. Pas sûr que grand monde passe par là !
On parvient alors à la première laguna El Cangrejo, qu’on contourne depuis la rive. Le sol devient alors extrêmement boueux, on se croirait dans une tourbière. Nous passerons les 2 prochaines heures à sauter de touffe en touffe, c’est éreintant.
Nous longeons la grande laguna Elefantita, parfois depuis la plage.
Soudain, à partir du sentier « Los Pumas », se découvre l’immensité bleutée du lac Cochrane, l’une des plus belles vues de notre voyage. Nous l’avions déjà entrevus depuis le mirador Tompkins mais nous bénéficions ce jour d’un soleil radieux qui irradie les eaux du lac. La redescente jusqu’à la rive est longue et tortueuse, le chemin n’est guère entretenu et de nombreux buissons épineux poussent de parts et d’autres, mais la vue est imprenable. En bas, nous optons pour le sentier « Los Ciruelillos » qui descend jusqu’à la plage et à un point dénommé « unofficial camping » sur notre carte. Un petit rectangle d’herbe tondue (non réglementaire d’après John) et une caisse de protection pour cuisiner, nous nous en contenterons volontiers. On monte la tente, engloutit les 400g de pâtes en crème et au dodo. Malheureusement la nuit sera fraîche et interminable, nous ne dormirons que trop peu.
Au matin, on remplit la gourde directement dans le lac et on poursuit le long de la côte. C’est vallonné, la végétation humide de la veille a laissé place aux pins. Avec les falaises et le soleil, il ne manquerait que quelques cigales pour qu’on se croit dans le sud. Au bout, l’eau translucide pénètre dans de longues criques, ça y est nous sommes de retour aux calanques de Marseille. On suivra ces eaux magnifiques jusqu’à l’entrée du parc Tamango et son splendide camping, encore plus aménagé que ceux de Chacabuco (abris fermés, poubelles).
Quelques kilomètres pour rejoindre Cochrane, acheter bière et avocats pour l’apéro du soir, et on s’essaie au stop pour la première fois. 5, 10, 15… voitures, ça paraît compliqué, puis s’arrête un 4×4 énorme. Il nous ouvre la remorque pour les sacs, elle est recouverte d’une épaisse poussière, un soupçon d’hésitation nous parcourt l’espace d’un instant, puis nous embarquons. Les faits relatés divergent, mais les 2 témoins s’accordent sur les principaux détails : pointes à 100km/h sur une piste de tôle, double dans les virages, même pas un ronronnement de moteur. Nous n’évoluons décidément pas dans la même monde !
On nous dépose au croisement avec le parc, il reste 10 km, nous en parcourons les 2/3 avant d’être pris en stop par un jeune couple d’allemands. Au centre d’accueil, on suit la route pour le camping West Winds, encore une fois, et un apéro mérité.
Bilan
Vous l’aurez compris, nous avons adoré notre semaine passée au sein du parc. Assez peu de visiteurs croisés, des sentiers à foison et le premier parc où nous nous sommes sentis libres d’explorer. Nous avons été bluffés par la diversité des paysages et la proximité avec la faune : bien sûr les guanacos par centaines, condors, lièvres et si nous avons (encore) joué de malchance, c’est un des lieux privilégiés pour observer le puma. Les français avec qui nous avions sympathisé nous ont conté leur course folle lorsqu’un spécimen a surgi des buissons pour prendre en chasse un lièvre, un vrai reportage animalier !
Pour les randonneurs aguerris qui disposent d’un peu de temps devant eux, nous conseillons grandement la traversée sur les 5 jours : économique (une seule entrée à payer pour les 3 secteurs), dépaysante (chaque secteur est radicalement différent) et aisément accessible à l’exception des 50km qui séparent l’entrée de Jeinimeni et la ville de Chilechico.
Cochrane
Ville de passage encore une fois, on se ravitaillera dans les divers supermarchés, un peu onéreux mais plutôt fournis, et surtout les derniers avant le ferry. C’est également l’entrée au secteur Tamango du parc Patagonia et le point de départ d’excursions sur le lac.
Glacier Calluqueo
En discutant avec un ranger du parc Patagonia, nous apprenons l’existence du glacier Calluqueo. A ses mots, ce glacier méconnu est superbe et la piste d’une cinquantaine de kilomètres, en très bon état. Le ferry part dans 2 jours, il nous reste encore un peu de temps, c’est parti !
On bifurque peu après la sortie de Cochrane sur une route goudronnée dans un premier temps, puis une piste vallonnée en très bon état. On croise la lagune Esmeralda qui porte bien son nom puisqu’elle reflète les montagnes dans des teintes émeraude. On remonte une rivière aux belles eaux laiteuses, la vallée se réduit, et on aperçoit un glacier sur la droite. La piste se change alors en tôle et s’élève lentement quand soudain, une grande lagune verte, laiteuse, presque fausse, apparaît, surmontée du fameux glacier Calluqueo. Face à nous, une immense langue de glace s’écoule de la montagne, sur le côté d’imposants pics de granit surplombent un second glacier. Autour, le silence. Pas un bruit, pas un chat (bien qu’un puma n’aurait pas été de refus), ici le vent est seul maître de la vallée.
Nous contemplons longuement cette œuvre éphémère de la nature. A pied, et après une fraîche traversée de gué, nous nous rapprochons jusqu’à atteindre le bord de la lagune.
Retour à la route, 2 lacets plus haut un mirador permet d’offrir une vue plus aérienne. Nous y dormirons pour la nuit, seuls au monde. Le coucher de soleil est fabuleux ; à cette époque il ne se couche pas avant 21h30, mais la vue nous ferait presque oublier le climat frais de la région. Nous nous relevons à minuit pour admirer le ciel, constellé d’étoiles. Nos tentatives de photos nocturnes sont un échec, il nous manque encore du matériel et une certaine expérience, tant pis les souvenirs resteront pour nous seuls, impérissables.
Au matin, nous partons pour le glacier. Un sentier existe sur notre carte OSM, il longe la lagune par la droite. Au loin, on se demande s’il ne s’est pas effondré tant certaines parties nous paraissent abruptes. Nous tentons bien sûr notre chance.
Premier gué dès le départ, l’eau est glaciale, ça revigore. Le sentier est curieusement très bien tracé. Il serpente dans les bois, en bordure de falaises, s’élève notamment sur la fin. Une morille nous montre la voie. A l’abord d’une combe, une rivière de roches résonne avec fracas. Un arbre reste miraculeusement suspendu au bord de la falaise. Camille n’est pas rassuré, mais le chemin semble sûr, nous poursuivons. Le second glacier, en dôme, nous fait face, étincelant par ce soleil radieux. On se rapproche. Nous sortons enfin des bois, et lui faisons face, notre première mer de glace en Patagonie. Elle est si immense, impressionnante, on ne saurait le résumer par des mots.
Quelle trouvaille pour terminer la Carretera austral ! Nous le savions méconnu et en effet nous n’aurons croisé qu’un groupe de jeunes sur le départ, puis plus personne jusqu’au lendemain. Nous ne comprenons guère le peu de curiosité qu’il suscite dans la région, sans doute dans l’ombre des Queulat ou Torres del Paine. D’ailleurs, il nous fit beaucoup penser à ce dernier, prévu quelques jours plus tard : pics de granit, lagune colorée, mer de glace… Comme un goût de reviens-y.
Caleta Tortel
Dernier village de la Carretera, du moins pour notre part. Nous ne ferons pas le détour jusqu’à Villa O’Higgins, trop long, bien que la route semble particulièrement scénique.
La route pour Caleta est poussiéreuse à souhait, on se retrouvera avec une couche épaisse sur tout l’intérieur du van. On retrouve le rio Baker, désormais immense et toujours aussi beau, avant qu’il ne se déverse dans l’océan. Peu avant le village, on se pose sur un parking près de la rivière, où bien d’autres vans viendront nous rejoindre. Fin de la discrétion et des spots perdus, nous sommes tous ici en prévision du ferry du lendemain.
Au matin, nous rencontrons enfin une famille avec qui nous échangions depuis quelques semaines. Ils sont sur la route depuis 3 ans, depuis l’Alaska, John en a les yeux qui brillent. On les recroisera fréquemment, la Patagonie est un si petit village !
Direction Caleta Tortel, à la recherche désespérée de pain pour grignoter. Mais guère de quoi se ravitailler dans ce patelin paumé. Sur les étagères des tiendas, un ou deux produits seulement, à prix faramineux. La promenade est pourtant formidable, tout le village est connecté par des pontons, sans doute plusieurs kilomètres en tout. Les habitants se garent à l’entrée et il faut ensuite marcher jusque chez soi.
Au bout, un sentier assez boueux permet d’accéder au cerro Vijia avant de redescendre à l’entrée du village. Les vues sur l’embouchure du Baker, les fjords et les montagnes environnantes vaut bien le détour.
Ferry Puerto Yungay – Puerto Natales
Le ferry se prend depuis Puerto Yungay pour les véhicules, depuis Tortel pour les piétons. La route à Yungay est dure, encore sauvage et offre les dernières vues de la Carretera.
Le ferry part à 20h, l’embarquement se fait par poids décroissant. Arrivés parmi les premiers, nous n’embarquerons qu’à la fin, ça valait le coup d’être en avance !
A bord, le questionnement en suspens est vite résolu, oui nous bénéficierons d’un premier repas pour le dîner. Au rdc, la cantine réservée aux repas, et libre d’accès en dehors. Café, thé, eau fraîche et jus d’orange douteux sont disponibles en libre-service.
A l’étage, les sièges assignés à chacun sont spacieux, inclinables et plutôt confortables. Pour les passagers avec un van comme nous, il est bien sûr possible de dormir dedans.
Les 41h du trajet sont rythmées par les repas, légers mais corrects, les rencontres et partages avec d’autres voyageurs. Dehors, de la pluie et des fjords à longueur de journée. Le capitaine annonce les points d’attention ; il fera lentement le tour d’un bateau échoué pour que chacun reparte avec sa photo. On s’arrête à Puerto Eden, un village de pêcheur perdu au milieu du canal, pour y décharger les marchandises. Malheureusement, on ne peut pas accéder au village, sans doute pour ne perdre personne en route. On profite du wifi à disposition, quand d’autres se ruent sur les empanadas et autres friandises vendues par les locaux.
Par chance, le temps se dégage en fin de traversée, on profite des derniers fjords avant d’arriver à notre destination, Puerto Natales où nous attend une petite balade de 8 jours .
Ce qu’on a aimé
- La route : une multitude de paysages, un mélange de routes pavés, de pistes de terre et de cailloux.
- Le parc Patagonia : immense parc, varié, où l’on a pu enfin errer à souhait. Une faune pléthorique avec guanacos, condors et pumas. Les campings sont très accueillants.
- Le rio Baker : suivre son évolution, ses nuances formidables de bleu turquoise et une eau laiteuse chargée en sédiments.
- Glacier Calluqueo : dans une région si parcourue et touristique, une vraie découverte que ce glacier délaissé où nous serons restés seuls pendant plus d’une journée à le contempler sous tous les angles.
- Les rencontres : une seule véritable route, on recroise donc souvent les mêmes personnes avec qui on échange et se lie d’amitié. Après de longues semaines esseulés dans divers coins du Chili, on a enfin pu croiser d’autres voyageurs et partager nos joies et nos galères.
Ce qu’on a moins aimé
- La météo : la Patagonie est rude et imprévisible. On aura essuyé de longues périodes froides et pluvieuses où le moral n’était pas au beau fixe.
- La saison : début novembre, le printemps, et pourtant il était encore bien tôt pour certaines zones. Cerro Castillo croulait encore sous la neige, quand le parc d’Hornopiren était impraticable. Peut-être aurions-nous aussi bénéficié d’une météo plus clémente à une autre période…
- Le coût : pas de location de véhicule ni de logement pour notre part, mais la Carretera Austral reste une région onéreuse entre le prix de certains parcs, les ferrys, l’essence et les denrées alimentaires…
Notre conclusion
La Carretera Austral aura rempli toutes les attentes que nous avions placées en elle. Nous avons été marqué par la diversité des paysages et les nombreux parcs et réserves qu’elle abrite. C’est une région encore préservée qui offre un vrai dépaysement.
On recommandera environ 2 semaines pour la parcourir. Nous y avons passé 16 jours et si nous avons traîné à certains endroits, nous avons également fait l’impasse sur d’autres. Quelques jours de rab peuvent aussi vous permettre d’attendre un climat plus clément pour certains parcs et prévenir de potentiels reports de ferry (c’est du vécu).
Nous avons fait le plein de provisions et essence dès que nous avons pu mais globalement, on trouve toujours une petite tienda pour acheter de quoi survivre (pâtes…).